Recommandations pour le comptage des piétons

Exemple

Ville de Lucerne

A l'avenir, les comptages piétons devraient faire partie des tâches des villes et des communes de manière aussi évidente que les comptages de trafic individuel motorisé (TIM), des transports publics (TP) et des vélos. Dans la Ville de Lucerne, des mesures ont été effectuées à trois endroits : sur le Seebrücke ainsi que sur la Schwanenplatz et la Löwenplatz. Des appareils laser, des caméras infrarouges et des caméras stéréoscopiques 3D ont été utilisés à cet effet. Les comptages ont eu lieu une semaine après la fin des vacances d'été 2019, pendant 3½ semaines. L'objectif des relevés pilotes à Lucerne était d'évaluer un système approprié pour des comptages permanents sur des tronçons très fréquentés à pied. Suite aux essais de comptages, la Ville de Lucerne a fait l'acquisition de deux appareils laser pour les comptages piétons permanents sur les deux trottoirs du Seebrücke.

Emplacement des compteurs pour le relevé pilote à Lucerne (illustration: rapport de recherche SVI)

Description

Contexte

Le microrecensement mobilité et transports, réalisé tous les cinq ans, fournit des informations statistiques sur le comportement de la population suisse en matière de transports, également sur la marche et le vélo en Suisse. Toutefois, pour pouvoir déterminer le nombre de personnes à pied à un endroit donné, il est nécessaire de procéder à des comptages tels que ceux effectués de manière routinière et permanente pour le TIM et les TP. La Ville de Lucerne doit non seulement adapter ses infrastructures de transport aux comportements de mobilité de sa population, mais aussi prendre en compte les déplacements des nombreux touristes qui se déplacent à pied dans la vieille ville et au bord du lac. Afin de pouvoir développer sa politique de mobilité, la Ville a décidé de collecter des données quantitatives sur la marche. Jusqu'à présent, il n'existait pas, à l'échelle nationale, de données fiables sur les technologies appropriées pour la saisie automatique des flux piétons (en particulier dans des environnements complexes). De même, il manquait jusqu'à présent des courbes de variation types et des coefficients d'extrapolation basés sur des comptages de courte durée pour extrapoler les valeurs du trafic journalier moyen (TJM) et du trafic journalier moyen en semaine (TJMO) pour la marche. De tels outils ont été élaborés dans le cadre de la recherche SVI 2018/009. 

Emplacement des compteurs (image: rapport de recherche SVI)

L'adéquation de trois systèmes de comptage a été testée sur les emplacements mentionnés ci-dessus à Lucerne. Ceci en complément à d'autres enquêtes pilotes menées à Bâle, Brugg, Olten, Soleure, Winterthour et Zurich. Dans tous les cas, l'accent a été mis sur le côté pratique des systèmes et leur pertinence face à certaines questions.

Offre

Les technologies existantes ne sont pas forcément adaptées à toutes les problématiques. L'évolution technique modifie en permanence l'offre. Les types de comptage suivants ont été testés dans le cadre du projet de recherche :

• Lors de l’enquête manuelle, ce sont les personnes sur place qui comptent à l’aide de formulaires, de compteurs manuels et d’une montre. Le TJM et le TJMO peuvent être extrapolés sur la base de ces valeurs à l’aide de courbes de variation types. Dans l’idéal les comptages doivent être effectués le soir entre 16 :00 et 18 :00.
• Lors de l’analyse manuelle des données vidéo, ces dernières sont enregistrées sur un support de données. Ensuite une personne visionne les enregistrements et procède au comptage sur cette base.
• Lors de l’analyse automatique de données vidéo, ces dernières sont enregistrées sur un support de données. Ensuite les enregistrements sont analysés par un centre de calcul. Cette méthode fonctionne aussi bien avec des données vidéo optiques que pour les enregistrements infrarouges.
• Les caméras avec analyse intégrée sont des caméscopes qui analysent les images instantanément et ne sauvegardent pas les images.
• Le capteur stéréo-optique est une caméra 3D à deux lentilles. Il permet d’analyser automatiquement une image 3D. Cela augmente la précision du comptage.
• Le capteur pyroélectrique ou capteur à infrarouge passif enregistre les changements de température de l’environnement. Des objets en mouvement peuvent ainsi être enregistrés, puisqu’il y a presque toujours une différence de température entre l’objet et son environnement.
• Le scanner-laser capte, à l’aide d’un rayon laser dans la zone infrarouge, les contours des objets qui traversent le champ du scanner-laser. À l’aide des contours, les différents objets seront reconnus et comptés.
• Le traçage Bluetooth et WiFi repère les smartphones, tablettes, smart-watches des environs à l’aide des adresses Mac spécifiques aux types d’appareils. Semblable au relevé des plaques minéralogiques, ce procédé permet de mettre en relation leur apparition aux différents points de comptage.

Expériences

Méthode de comptage conseillée selon la durée de l’enquête (graphique: rapport de recherche SVI)

L’analyse des sept enquêtes pilotes a révélé que c’est avant tout la durée d’enquête qui détermine le choix de la technologie à utiliser (et le type de données dont on a besoin), plus que la problématique en elle-même :

• Pour une enquête courte (2-12 heures) on se concentrera sur le comptage manuel sur place ou sur l’analyse manuelle d’un enregistrement vidéo. L’investissement en temps pour l’installation et le calibrage d’une méthode automatisée dépasse souvent l’investissement en temps du comptage manuel.
• Pour des comptages de durée moyenne (1-14 jours), l’investissement pour installer un instrument de comptage qui fonctionne avec un accu pour la durée de l’enquête est justifié (capteurs pyroélectriques, cameras avec analyse intégrée, scanner-laser, traçage Bluetooth et WiFi).
• Pour des enquêtes d’une durée plus longue, d’une année ou plus, toutes les technologies à analyse automatique des données intégrée au capteur sont adaptées. Ces technologies doivent être sur alimentation électrique.

Pour l’élaboration des courbes de variation en fonction des motifs de déplacement et des coefficients d’extrapolation, les données du microrecensement « Mobilité et transports » et des comptages ont été analysés en détail. La toute première analyse détaillée sur la courbe journalière des déplacements piétons sur la base du microrecensement révèle que les plus grandes différences dans la journée apparaissent selon l’âge et les motifs des déplacements. Il y a peu de différences dans la courbe journalière entre les degrés d’urbanisation (ville, agglomération, zone rurale) ou les différentes régions linguistiques. Seules les régions italophones et les régions rurales montrent une légère variation selon le motif de déplacement.

L’analyse des données de points de comptage permanents des cantons Bâle-Ville, et des villes de Zurich, Bienne et Saint-Gall indique que les courbes de variation durant la journée, sur la semaine et sur l’année peuvent être classées en 6 catégories. Les résultats de cette analyse sont en première ligne valable pour les grandes villes en Suisse alémanique et en particulier dans des zones proches des centres-villes. En Suisse italienne ainsi que dans les communes péri-urbaines ou rurales, nous n’avons pas eu connaissance de comptages piétons permanents. L’absence de données ne permet aucune affirmation définitive et fiable.

Les coefficients d’extrapolation ont par la suite été calculés pour chacune des 6 typologies de points de comptage. L’analyse montre que les coefficients sont efficaces pour extrapoler les données d’un comptage court sur le trafic journalier et grâce à la correction du jour de la semaine et du mois sur un TJM et TJMO.

Effets

Environnement et énergie

Une meilleure connaissance du volume et des flux des déplacements à pied montre l’importance considérable de la marche pied en localité. Les chiffres permettent une comparaison avec d’autres modes de transport dans la même zone d’étude. On dispose ainsi de bases plausibles qui suggèrent qu’à l’avenir, davantage de moyens financiers devront être mis à disposition pour les infrastructures piétonnes. Cela permettra de soutenir les objectifs de transfert modal vers une mobilité durable et d’améliorer le bilan environnemental et énergétique des transports (réduction de la pollution atmosphérique et sonore, utilisation plus économe des ressources limitées en sol et en énergie).

Société

Le manque d’activité physique et l’obésité constituent un problème de santé publique et entraînent des coûts de santé élevés. La promotion de la marche est un instrument relativement simple, efficace et bon marché pour inciter la population à faire plus d’exercice au quotidien. L’amélioration des infrastructures piétonnes et le soutien par des campagnes de communication apportent une contribution supplémentaire pour que la population se déplace plus et plus souvent à pied. Les comptages de piétons sont une condition importante pour renforcer toutes ces mesures de promotion, car ils soulignent l’importance quantitative de la marche et fournissent des arguments pour inscrire la marche à l’agenda politique. Jusqu’à présent, les comptages de piétons demandaient beaucoup de temps et d’argent, mais grâce à ces nouvelles méthodes d’enquête, et notamment à l’option d’extrapolation des enquêtes de courte durée, cela est beaucoup plus facile.

La communication des résultats aide en outre à sensibiliser la population aux questions de comportement de mobilité et aux transferts modaux nécessaires. Si les autorités se préoccupent des déplacements à pied en ville, elles montrent de manière crédible à la population que la société accorde aussi suffisamment de valeur à la marche. Grâce à l'utilisation simple de comptages du trafic piéton et aux nouveaux facteurs d'extrapolation, il est possible de démontrer de manière plausible qu'il est par exemple judicieux de développer les infrastructures piétonnes le long des tronçons de rues très fréquentés.

Economie

Si l'on considère toutes les distances qui peuvent être parcourues sans problème à pied ou en combinaison avec d'autres moyens de transport, la marche présente un très bon rapport coût/bénéfice. C'est surtout pour les distances inférieures à 2 km que la marche est économiquement compétitive par rapport à d'autres modes de déplacement et qu'il faut s'efforcer d'opérer des transferts modaux en conséquence. Investir dans des comptages piétons qui permettent ensuite d'améliorer les conditions de déplacement à pied signifie donc de faire des économies à long terme.  

Des méthodes de comptage piétons peu coûteuses sont des bases de travail importantes. Si l'on dispose de chiffres sur le volume et le comportement des personnes à pied, il est plus facile d’obtenir le financement de projets en faveur des déplacements à pied sur la base de ces informations quantitatives. Les communes ont entre-temps la possibilité d'effectuer elles-mêmes des comptages fiables, simples et peu coûteux qui, grâce aux coefficients d'extrapolation, ne nécessitent qu'une durée de recensement relativement courte.

De plus, la promotion de la marche contribue à réduire les coûts financiers dans le domaine de la santé et donc à alléger les finances publiques.

Outils

Démarche

Les étapes suivantes sont nécessaires afin de procéder à des comptages piétons :

1. Questions de départ issues de la pratique : Réseau : sélection représentative de points de comptage (concept de comptage) pour un monitoring ou les trajets à grande échelle. Surface : flux piétons linéaires : zones piétonnes, trottoirs, chemins ou surface mixte piéton/vélo. Traversées : avec ou sans îlot central, carrefours ou espaces piétons complexes ou interfaces de transports publics : arrêts et gares
2. Choix de la temporalité / déroulement des comptages : Le volume de trafic piéton peut varier au cours de l'année. Il est important de compter en dehors des vacances scolaires et d'exclure l'influence d'éventuelles grandes manifestations. La Ville de Lucerne a par exemple commencé ses comptages piétons une semaine après la fin des vacances scolaires d'été, c'est-à-dire à une période sans grandes manifestations. Pour les comptages manuels de courte durée, il convient de tenir compte des types de courbes de variation et de choisir l'heure de relevé la plus appropriée pour une extrapolation (dans la plupart des cas entre 16h00 et 18h00).
3. Choix du type de compteur : Manuel ou mécanique
4. Choix de l’emplacement des compteurs : A grande échelle ou à petite échelle. Il faut tenir compte des possibilités de montage des appareils de comptage.
5. Calibrage des appareils et vérification de la fiabilité de la méthode de comptage au moyen de comptages manuels.
6. Mise en forme et analyse des données, communication 
7. Accompagnement technique : la déroulement et l’analyse des comptages ont été accompagnés par le bureau Urban Mobility Research de Zurich ainsi que Mobilité piétonne Suisse et Pestalozzi & Stäheli GmbH

Financement

Le projet de recherche SVI a été financé par l'Office fédéral des routes (OFROU). Les relevés ont principalement été pris en charge par les communes pilotes. Par exemple, le service des ponts et chaussée de la Ville de Lucerne a pris en charge les comptages piétons du Seebrücke, de la Schwanenplatz et de la Löwenplatz et a décidé d'acheter des appareils laser suite à ces expériences positives.  

Les coûts des comptages de piétons dépendent fortement du nombre de lignes de comptage et de la durée de l'enquête. Grâce aux courbes de variation types et aux coefficients d'extrapolation, il est désormais possible d'obtenir des informations sur le volume de piétons avec des relevés peu coûteux.

Marketing

Les résultats des enquêtes pilotes montrent que les comptages piétons peuvent être réalisés de manière simple, efficace et économique à l'aide d'outils techniques. Grâce aux coefficients d'extrapolation, une courte durée de relevé suffit pour obtenir des informations concluantes sur le volume de piétons. Les comptages temporaires ou permanents illustrent, outre le volume, l'évolution des déplacements à pied et aident ainsi les décideurs politiques à justifier la promotion de la marche. La marche étant manifestement le mode de déplacement le plus durable, il s'agit de savoir comment inciter d'autres personnes à marcher plus souvent.

A Lucerne, la plupart des touristes se déplacent à pied dans le centre-ville. Les résultats des comptages montrent l'importance des nombreux groupes de touristes et soulignent également le statut particulier de Lucerne en tant que ville touristique. Les données et les observations sur les flux piétons fournissent des indications importantes pour améliorer l'exploitation et optimiser l'aménagement des rues, l’attractivité des espaces de séjour et les possibilités de traverser en toute sécurité.

Informations complémentaires

Autres liens

• Rapport de recherche SVI 2017/009: Recommandations pour le comptage des piétons 
• Information sur le projet: Comptages piétons dans la Ville de Lucerne (de)
• Seebrücke, Schwanenplatz et Löwenplatz - Comparaison de différentes technologies de recensement

Documents en allemand

• SVI-Forschungsbericht 2017/009 "Empfehlungen zur Zählung des Fussverkehrs" (2022) [PDF, 7.61 MB]

Adresses de contact

Mobilité piétonne Suisse
Dominik Bucheli
Klosbachstrasse 48
CH-8032 Zurich
Tél. 043 488 40 30
 

Pestalozzi & Stäheli GmbH
Christian Pestalozzi
Aeschenplatz 2
CH-4052 Bâle
Tél. 061 361 04 04
 

Urban Mobility Research
Daniel Sauter
Mühlebachstr. 69
CH-8008 Zurich
Tél. 044 382 02 88
 

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